« Un continent derrière Poutine ? », 85 minutes pour survoler ce continent – et les faits ?

Le 18 Mars dernier, France 5 a diffusé ce reportage. La promesse d'Anne Nivat est d'aller à la rencontre des Russes, afin de les connaître et de les comprendre. Le voyage au sein de la Russie actuelle aura duré environ 4 mois. Le reportage, lui, dure 85 minutes. Elle rappelle que c'est un pays "immense, complexe". Mais à peine ce rappel est-il effectué, qu'elle évoque un pays partagé entre de "vieux démons" (un langage religieux significatif) et ses "désirs d'émancipation". Pour faire ce voyage, elle a décidé de mettre ses pas dans ceux de Soljenitsyne, un auteur controversé – il faut dire que Papa Nivat est un inconditionnel et un spécialiste de celui-ci (il faudrait savoir pourquoi  : pour son anticommunisme ? son soutien au royalisme ? à l'Eglise orthodoxe ?). Le reportage, en fait, est en décalage, avec la promesse, impossible : aller à la rencontre DES Russes, et ce sont seulement quelques Russes qui sont rencontrés, avec lesquels elle dialogue. Plusieurs questions se posent : comment a t-elle été mise en contact avec ces Russes ? Quels ont été les critères de sa sélection ? Le fil rouge du voyage et des rencontres, est le rapport de ces Russes à M. Poutine, identifié, dans le reportage, comme un autocrate, voire un dictateur. Le premier Russe rencontré, Pacha, de Vladivostok, évoque Alexis Navalny, et la journaliste affirme que la plupart de ses interlocuteurs lui ont parlé de cet "opposant", lequel n'a pas pu se présenter à l'élection présidentielle russe. Ce candidat d'extrême-droite, soutenu par les Etats-Unis (comme ses semblables l'ont été, le sont, en Ukraine), fait l'objet, comme d'autres figures, comme Soljenitsine en son temps, d'un soutien actif, étatique, médiatique, dans les pays occidentaux, sans rapport avec ce qu'il signifie socialement, politiquement, en Russie. Et c'est avec de telles références, que le reportage devient très faible, parce qu'il n'y a aucune comparaison avec les pays occidentaux, notamment les Etats-Unis, la France. Par exemple, en France, pour pouvoir être candidat(e) à l'élection présidentielle, il faut bénéficier de parrainages par les maires de France. Il s'agit d'un contrôle censitaire, qui a empêché de nombreux citoyens et de nombreuses citoyennes, de présenter officiellement et validement leur candidature. Et un candidat comme Coluche a subi des menaces de mort, et ces menaces l'ont conduit à annuler sa candidature. Par l'absence, systématique, de comparaison, les problèmes évoqués par la journaliste paraissent spécifiquement russes, et particulièrement graves. Un autre interlocuteur n'a pas été aidé pour créer son entreprise. En France, des aides existent…, sur le papier. Mais en fait, les petits entrepreneurs ont les plus grandes difficultés pour en obtenir une, et, en général, ne les obtiennent pas. Elles sont, en général, très conditionnées. Quand il s'agit des souhaits/rêves de Sasha pour la Russie, ils peuvent être, sans aucun problème, transposés en France : avoir la possibilité d'un choix (d'un vrai choix, ce qui signifie, d'avoir des alternatives, et non des candidates et candidats qui relèvent d'un même système, logique, ce qui est le cas en France, et pire encore aux Etats-Unis, avec la tenaille Républicains/Démocrates), que des personnes qui ont des compétences et des talents puissent les mettre au service du pays (et en France ? !), qu'il y ait moins de corruption (rires). Quand il s'agit d'évoquer la période soviétique et ses constructions, la journaliste parle de "stigmates". Quid des banlieues et périphéries, de Paris, Lyon, etc ? Quid de quartiers abandonnés, avec des immeubles de type victorien, à New-York, où des familles pauvres étaient et sont entassées ? ! Parlerait-elle de "stigmates" ? ! Quand il s'agit du système de santé, il faut comparer, et la comparaison s'avère pénible – pour nous. En effet, quand le système de santé russe a beaucoup progressé, s'est vu doté de moyens suffisants pour, les naissances, les opérations, notre propre système de santé est mis en difficulté par un sous-financement, et aux Etats-Unis, le système de santé public est dans une situation très grave. A l'occasion d'un échange avec un responsable d'un site médical, l'un des propos, sens, politiques, du reportage, apparaît clairement : alors que le professionnel évoque les efforts qui ont été faits, en matière d'investissement, mais qui auraient pu être plus importants encore, la journaliste compare ces dépenses avec les actions et dépenses militaires de la Russie, notamment en évoquant (elle le fait à plusieurs reprises), "la Crimée", avec ces dépenses pour la santé des Russes. Or, cette question, cette journaliste, et au-delà d'elle, les journalistes installés, à Paris, la posent t-ils, pour l'Etat français, dont le budget militaire reste, encore, important (et pour certains, pourtant, très insuffisant), au profit donc d'un budget supérieur pour la Sécurité Sociale ? ! Les éléments de langage concernant "la Crimée" sont ceux des élites européennes, des Etats-Unis : la Crimée aurait été annexée par la Russie. Or, là encore, à l'exception du reportage de Paul Moreira sur "la Révolution Orange" ou "de Maïdan", nous n'avons vu aucun reportage diffusé sur les chaînes françaises concernant les influences étrangères qui ont agi pour réussir à faire destituer le pouvoir en place, installer celles et ceux qui, depuis, sont au pouvoir dans ce pays, avec les "résultats" que l'on connaît (notamment concernant les mafias ukrainiennes). Concernant les sentiments, avis, propos, de ce médecin, sur "l'homosexualité", là encore, une comparaison serait utile : serait-il si difficile de trouver en France, aux Etats-Unis, un père de famille, homophobe ou non homophile ? ! Comment expliquer alors que, avec "la Manif pour tous", la France ait vu défiler des centaines de milliers de personnes, dans Paris ? Lorsqu'elle interroge un photographe professionnel, celui-ci met en cause le gouvernement pour la situation économique. La même question est-elle posée à des citoyens en France ? Lors de cet échange, elle salue le propos anti-Poutine de ce photographe – preuve que c'est ce qui était très recherché. Même problème : et si nous parlions de la situation des photographes professionnels indépendants en France ? ! Concernant le fait que, avec le système politique, "tout est déjà décidé", tout est sous contrôle, il faudrait comprendre que ce qui se passe en Russie est particulièrement grave et spécifique, mais comment comprendre l'énorme abstentionnisme en France ? ! Idem sur le sujet des revenus et des retraites : elle entend que la situation économique s'est améliorée, mais les revenus et retraites cités sont souvent faibles, par comparaison avec nous. Mais pour pouvoir les mesurer, il faut prendre en compte les coûts et les prix, locaux, nationaux. En France, certaines, certains, perçoivent une retraite très faible, une allocation, également très faible, une retraite, également très faible, lesquelles permettent seulement de survivre – et encore. La journaliste passe par le Birobidjan, cette République Soviétique, refuge pour les Juifs soviétiques, unique dans le monde, avant la création d'Israël. En France, combien peuvent dire, comme Sergueï, que le résultat des élections ne changera rien (en mieux), à leur situation ? Inversement, tous les Dimitri Ramouzov du monde ont de grandes maisons, ont des revenus importants. Quoiqu'il en soit, les Russes inclinent en faveur de la stabilité, de la paix, et ne marchent pas dans les coups de communication des "opposants", et ils ont de la mémoire, sur ce qu'ils ont subi, de la part de cette Europe de l'Ouest, avec son armée nazie/fasciste. Hélas, avec l'OTAN présente dans tous les Etats frontaliers de la Russie, les Etats baltes, la Pologne, etc, une réplique de cette armée a été reconstituée, dans un projet de guerre, contre la Russie. Le reportage se termine par une rencontre, un échange, avec deux jeunes homosexuels. L'homophobie, les agressions, les crimes homophobes, une spécialité russe ? ! Et en France ? Et aux Etats-Unis ? L'un d'eux reconnaît même qu'il existe une loi, en Russie, contre les discriminations. Il faut dire que, désormais, une organisation comme l'OTAN  a récemment déclaré sa flamme aux personnes homosexuelles, discriminées. C'est que ses dirigeants ont désormais décidé que les préférences affectives et sexuelles de ses soldats, officiers, leur importaient peu, tant qu'ils exécutaient les ordres, notamment en cas de guerre contre la Russie. Il est terrible de voir que des personnes puissent être instrumentalisées pour tenter d'attaquer, discréditer, un pouvoir, un pays, alors que, par ailleurs, il y a tant de problèmes graves, identiques ou quasi, dans d'autres pays du monde. Il faut souhaiter que de tels reportages, et surtout plus substantiels, seront faits, en parcourant la France, les Etats-Unis. Des reportages sérieux révéleront, révéleraient, des réalités et des problèmes civiques, inouïs.

A la fin des années 90, elle a obtenu un Bourse américaine : https://fr.wikipedia.org/wiki/Programme_Fulbright

 

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