La banalité du mal, français, tient encore à une écriture : un projet de loi, une parole politique, contre la vie de la majorité civique. La loi sur les retraites entend imposer que du temps, vital, soit passé dans un cadre salarié ou supposé (chômage), afin de reculer l’âge légal à partir duquel les travailleurs peuvent décider librement de partir – principe auquel ils ont couplé, depuis longtemps, celui des « annuités » exigées, lesquelles, mécaniquement, induisent des départs tardifs, souvent bien au-delà de l’âge légal de départ. Quant aux montants réels des retraites elles-mêmes, le système prolonge les inégalités de carrières, entre les hommes et les femmes, les cadres et les ouvriers, sur un principe de proportion, sans péréquation. Or, le temps, c’est de l’argent ET de l’or, ou plutôt, une valeur estimée et une valeur inestimable, hors de prix. Chaque seconde passée dans un travail nécessaire, pour les non fortunés, est une seconde de vie, perdue, et rien ne peut faire revenir le temps perdu. Des 90km/h réduites aux 80 km/h jusqu’à la contre-réforme des retraites, ce gouvernement ralentit les vitesses des vies des pauvres, quand ils accélèrent les vitesses d’enrichissement des plus fortunés, les expulsions des pauvres, la circulation de fausses informations sous le couvert de « médias reconnus » : pas de limites aux vitesses de vol des plus fortunés, du pillage des ressources collectives à celles de leurs jets privées, des limites toujours plus sévères aux vitesses vitales des travailleurs pauvres. Et pour faire cela, le gouvernement ECRIT : l’Action Littéraire est sa PUISSANCE.
Si ce blog a pour titre « l’action littéraire », ce n’est ni pour en faire un éloge, en la confondant avec la « littérature », ni pour en faire une critique systématique, mais pour prendre en compte la force de son fait. L’écriture, naissance même de l’action littéraire, fixe/fige la parole, qui lorsqu’elle devient une Constitution, définit des puissances/impuissances. Les « principes » évoqués dans ces écritures acquièrent le statut des Idées, tel que conté dans le platonisme (et non avec Platon). Ils peuvent même être creux, comme le sont depuis belle lurette en France, « liberté », « égalité », « fraternité » : des arguments spécieux et commerciaux pour inventer une « France des Droits de l’Homme » qui n’a jamais existé, au-delà de la pure et simple « déclaration » – encore une oeuvre, écrite. La France fait du surplace, depuis la 3ème République : tout ce qui caractérisait cette première, durable et très affreuse « République » bourgeoise (à ce sujet, il faut impérativement écouter Henri Guillemin, dans la vidéo ci-dessus), est encore déterminant aujourd’hui, du colonialisme devenu désormais le fanatisme capitaliste, le racisme, les inégalités, énormes, ce Paris politique et mondain, d’une laideur absolue, cette Ecole réduite à peu, les lois scélérates contre les anarchistes là, et maintenant les musulmans et les opposants-résistants, et ces Versaillais-de-Thiers qui paradent à Paris, depuis la victoire de Foutriquet en 1871. Si le Général Boulanger a fini par perdre, un autre Général a obtenu les pleins pouvoirs avec une Constitution, superficielle, partielle, monarchique, explicitement antidémocratique, et le locataire de l’Elysée aura démontré à quel point ses articles rendent possible des drames, des tragédies, dès lors qu’elle est entre les mains du fanatisme déjà évoqué.
Mais voyons bien les racines de : il y a ces scribes qui dessinent les squelettes des vies et des mouvements, dans une pensée du corps-mort du citoyen, par les abstractions, plutôt que par la pensée de son corps-vivant, fragile, souffrant, lié à ses frères et soeurs de condition. Ce système est la négation de l’existence et de l’importance de la majorité civique, des travailleurs. Il promeut des « clercs », laïques, voix des dogmatismes, notamment du fanatisme, déjà évoqué. Les votants d’une loi contre le séparatisme sont eux-mêmes, de fait, séparés, volontairement, d’une majorité dont ils ne partagent rien : ni les conditions d’existence, ni les revenus, ni les soucis, ni les codes culturels, ni les préférences culturelles, ni la mémoire historique. Dans un même territoire abstrait, « la France », une majorité et une minorité coexistent, sans aucun rapport, mais la seconde vit grâce à la première, tout en la méprisant et en passant son temps à conspirer contre elle. « Comme » (1) George Floyd, nous en sommes arrivés au stade où nous pouvons dire que, que nous ayons sur la gorge le genoux d’un policier ou celui de l’Etat, d’une manière ou d’une autre, « je ne peux plus respirer ». Dès lors, fort logiquement, il y a une autodéfense, puisque, la France, c’est nous. Or, beaucoup sont en train de le comprendre : ceux qui dirigent votent des lois, mènent des politiques qui, petit à petit, nous font devenir des étrangers dans notre pays, en nous expulsant, des logements, du travail, de la parole publique, de la mémoire historique. A ce stade, les uns et les autres disent de manière élémentaire : enough is enough. Assez, c’est assez ou trop, c’est trop. Overdose de bourgeoisie. Ces « gens importants « qui « ne sont rien ». Parce qu’il faut les voir, de près, ces ectoplasmes, en costume, comme le furent en leur temps ces aristocrates en bas de soie, ce vide humain, dont la seule pensée réside dans des calculs comptables pour lesquels ils ne sont même pas compétents : cela s’esbaudit à quelques phrases de ridicules, dès lors qu’ils peuvent croire se rassurer en se comparant tout en usant de miroirs déformants afin de se voir top models quand ils ou elles sont… Parce que les Instagram et Tik-Tok sont des conséquences et non des principes novateurs : ces miroirs déformants furent, la photographie « esthétique » pour magazines à la Paris-match, la télévision avec façades maquillées, les livres de biographies politiques écrits par des thuriféraires. La société du spectacle parisienne est l’Allégorie de la Caverne elle-même : tout y change pour que rien ne change. L’argent est leur garantie, de stabilité, bien plus que la Constitution elle-même. Et dans une économie de plus en plus privatisée, l’argent est requis partout. Ainsi, ils sont devenus toujours plus « puissants ». Mais près de quelques dizaines de millions de citoyens ne peuvent pas vivre dans un monde réduit aux calculs de ces mauvais comptables : aucun récit humain ne lie ainsi les uns et les autres. Ces chercheurs en anti-fusion ont réussi à créer le vide : la vie humaine est devenue désincarnée, et tout y concoure.
Ce n’est pas pour rien que les populaires, porteurs de la vieille sagesse humaine universelle, tiennent tant aux incarnations, aux corps vivants, amoureux, dansants, chantants. Mais cette vieille sagesse a beau signifier et valoir, elle est en danger de mort, avec ses adeptes, puisque les puissants sont devenus infiniment plus néfastes et dangereux que leurs prédécesseurs, les Adolphe Thiers, Napoléon 1er comme 3, Louis XIV, etc. Ils mènent une guerre en Ukraine comme ils mènent une guerre en France, en usant d’autres hommes, d’autres moyens, mais une guerre puisqu’ils visent l’existence même : l’anti-existantialisme n’est pas un humanisme. Les « gens de la haute » n’ont aucune, idée, expérience, connaissance, perception, des moyens utilisés, puisqu’ils n’y sont pas confrontés, puisqu’ils sont divers : il y a les allocations chômage réduites à presque rien ou pire, les suppressions d’allocations chômage, il y a les prises en charge médicales retardées, longues, les problèmes de santé qui ne sont pas soignés, les morts au travail, les énervements fatals parce qu’ils poussent à des violences extrêmes, à cause des conditions générales d’existence, les suicides, les dépressifs graves. En lieu et place du génocide, trop terrible, trop lourd à gérer, ils préfèrent l’élimination individuelle, d’une mort que les « médias » d’Etat ne relieront jamais à la politique menée en France, comme ces « morts de la rue », qui seraient « morts de froid » ou de chaud, alors que le problème de la température est une conséquence de l’interdiction qui est faite à ces sans-dans-la-rue d’avoir un habitat. Ces faux Dieux se rient des hommes qui déplorent les effets dont ils choisissent d’ignorer les causes. A un citoyen qui lui parlait, le résident de la République sis à l’Elysée lui a répondu : ah oui, mais vous, vous êtes un militant. Comme si, lui, n’était pas un très actif militant. Tant encore refusent de faire les liens entre lui et ces effets, mais, actuellement, de moins en moins. Il faut saluer cette lucidité qui fait son retour, qui manqua pendant si longtemps, en espérant qu’elle parvienne à une certaine fécondité, politique. Il lui faut résoudre le problème de son impuissance sociale, politique. Par les grèves, les blocages, cette majorité civique a déjà retrouvé le chemin d’une certaine puissance. Mais il faut aller jusqu’au bout, et, clairement, se dire que l’objectif est révolutionnaire.
(1) : Quel « comme » ? Evidemment, nous ne mourrons pas, asphyxiés, comme George Floyd. Lui a été privé d’oxygène pendant quelques minutes, et il a ainsi été assassiné. Au moins, aux Etats-Unis, le principal responsable de, a été arrêté, jugé, condamné. Il y a trois temps/durées : le temps court, le temps moyen, le temps long. Dans le temps court, nous sommes asphyxiés par des gaz lacrymogènes, si dangereux pour la santé, notamment des personnes ayant des problèmes pulmonaires, et la police française s’est habituée à « gazer », ce que nous ne devrions pas tolérer; le temps moyen, le temps d’une vie, avec cette loi retraites, qui obligerait toute personne à travailler, ou essayer de travailler, plus longtemps, alors que, là encore, des personnes ont des problèmes de santé, et que ce temps passé supplémentaire au travail aggraverait leurs problèmes de santé; enfin, le temps long, les décennies, avec le changement/réchauffement climatique, puisque, comme le dernier rapport du GIEC le confirme, les populations humaines sont diversement menacées par une augmentation moyenne de la température, ce qui impliquera que des populations subiront des températures absolument étouffantes, avec des chaleurs très fortes, qui entraîneront des morts. Le coeur du problème réside donc bien dans une violence d’Etat contre les citoyens, dont les violences « policières » sont un symbole, sans en être la totalité.
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