Covid-19, France, stade 3 : De l’Allemagne (philie-phobie, l’oubli des nuances)

 Un média culturel national a publié, sur son réseau social, un article concernant la situation actuelle, afin d'évoquer celle, particulière, de l'Allemagne, et, à l'occasion, énoncer un nouvel éloge de la "Sainte Famille" germanique, avec laquelle, une fois de plus, moyens et résultats seraient, par comparaison, meilleurs que ceux de a France, et dont une part reviendrait aux compétences et aux choix de la Chancelière en poste. Comme il va de soi sur un réseau social, des commentaires se sont multipliés, et un énième choeur "français" pour chanter "le génie de l'Allemagne" s'organisa et entonna l'Hymne ! Comme on sait, les membres d'une chorale sont si heureux de chanter que celui qui ose parler en même temps, pour, en plus, exprimer un avis sensiblement différent, pour tempérer cet enthousiaste, voit sur lui regards courroucés et des vitupérations tombées, résumées par un : vous êtes un germanophobe ! Autant dire que si vous n'êtes pas aussi et comme eux, germanophile, vous êtes donc… phobe. Comme si, entre l'extrême "philie", aveugle, et l'extrême phobie, imbécile, il n'y avait pas bien plus de 50 nuances. Il faut dire que, comme quelques auteurs l'ont remarqué, qu'il s'agisse de notre temps présent ou d'une époque antérieure, il y a, dans ce pays, un culte à la Germanie, une manie de la Germanie, qui serait un "modèle", qu'il faudrait suivre, imiter, impérieusement, pour être aussi impériaux que nos cousins le sont devenus. De l'Empire "napoléonien", français, nous serions passés à un "Empire" allemand, sur l'Europe, qu'il faudrait saluer, accompagner, auquel il faudrait contribuer, auquel il faudrait… collaborer. Comme l'Empire napoléonien était contraire et à "la Déclaration des Droits de l'Homme", au respect des peuples et des personnes ET aux intérêts français (le retour de bâton de l'aventure impérialiste aura été une longue nuit monarchique/autocratique, jusqu'en 1871, prolongée par une III République qui en prolongera la volonté), la puissance allemande, actuelle, en Europe, via l'UE, est un nouvel "impérium" problématique, d'autant que, comme tous ceux du passé, ce qu'il met en valeur et ce qui le met en valeur dissimulent des problèmes graves. En être conscient, les évoquer, en parler, les analyser, les critiquer, n'induit en rien une hostilité ou une haine envers l'Allemagne. Sinon, celles et ceux qui ont pu résister dans le passé à un autre projet impérial allemand auraient pu être aussi traités de "germanophobes", mais pour cela, encore eut-il fallu que les acteurs, les chantres, allemands, de ce nouveau projet soient à eux seuls l'Allemagne, alors que nous pouvons penser qu'ils en furent, au contraire, une négation. Mesurer, exactement, ce que fut, ce qu'est, cette Histoire, de l'Allemagne, c'est donc un impératif catégorique de cette conscience qui doit savoir, ce qu'il en est, et non se raconter des chansons. Est-ce que la gestion, en Allemagne, de la crise, dite du Covid-19, est, bien meilleure que celle de la France, supérieure, voire parfaite ? Ou s'il y a des réussites, y a t-il des échecs et des difficultés ? Quel est le système national allemand, concernant la prise en charge des personnes souffrantes, malades ? Et ce souci gouvernemental allemand pour les personnes malades, souffrantes, est-il le marqueur d'une politique générale philanthropique ? D'un côté, nous entendons les chants/voix de ces idéologues de "Deutschland Uber Alles", comme ici, et ici, nous pouvons lire le témoignage très critique d'un médecin allemand. Ici, un contributeur de Médiapart écrit : "Pourtant un petit hebdomadaire Berlinois « Der Freitag » qui comme son nom l’indique parait le vendredi, publie sur son site en ligne, ces derniers jours, des articles qui ne décrivent pas un système de santé en très bonne forme. Lé dérégulation néolibérale depuis 30 ans du système de santé, soumis aussi à une version de tarification à l’acte et à des restrictions budgétaires, à eu pour conséquences la faillite de nombreux hôpitaux communaux, rachetés par de puissants groupes privés, si bien que la part des cliniques à but lucratif est passé en 25 ans de 15 à 30 pour cent et plus de l’ensemble du système hospitalier. De plus, le système d’assurance sociale et de santé Allemand est binaire. Il y a d’un côté le régime général pour la grande majorité des Allemands (Allgemeine Krankenkasse) et un système privé (Privat Patient) donnant à ses affiliés (Professions libérales et CSP+++) une priorité dans l’accès aux meilleurs soins et dans le plus grand confort." Donc, les dirigeants allemands auraient clairement fait le choix de l'inégalité : un hôpital public low-cost, et des hôpitaux privés, qui assurent une médecine de haut niveau, mais pour une minorité. Une fois de plus, on comprend pourquoi quelques Français "germanophiles" ont tant de facilité à déclarer leur flamme à cette Allemagne. Nous, comme dans le passé, c'est une autre Allemagne que nous aimons, d'autres Allemands que nous aimons. On n'est pas germanophobe parce que nous n'aimons pas l'Allemagne de Mme Merkel et consorts, on est germanophile parce que nous ne nous laissons pas et ne laisserons pas imposer que cette Allemagne de Mme Merkel et consorts soit, à nos yeux et pour le reste du monde, toute l'Allemagne, parce que nous savons que nous pouvons attendre, d'un pays où il y a tant d'entendements brillants, une autre, politique, d'autres choix.

Dans "Le Silence de La Mer", le monologue de l'officier allemand, apparemment "francophile", reste un monologue – les Français qui l'écoutent ne lui répondent pas. Aujourd'hui, nous pourrions faire la liste de ce que, dans l'Histoire, la culture, allemandes, nous aimons, nous lisons, nous écoutons, nous respectons. Mais, à aucun moment, nous ne confondrons un penseur de langue allemande, comme Einstein, avec un chancelier/une chancelière, dont les principes et les choix politiques ne sont pas admirables. Le premier aura toujours nos applaudissements, les seconds auront toujours nos critiques.

 

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