Une trentaine d'organisations syndicales et d'ONG ont écrit au président François Hollande lui demandant de prendre position sur le projet de directive européenne sur le secret des affaires, "pour protéger les libertés et les droits fondamentaux".« Cette directive est issue du lobbying exercé par des multinationales comme Michelin, Alacatel, Althom, Intel ou Dupont de Nemours » a dès le début d’un point presse mercredi 2 décembre, a souligné d’entrée Sophie Binet de l’UGICT CGT. Entourée des représentants d'une dizaine d'entre elles, dont les syndicats de journalistes CGT et SNJ, la Ligue des droits de l'homme, l’UNSA, Attac et Les économistes atterrés, la FSU ou la Quadrature du net. Ces organisations ont présenté leur initiative, reprise dans d'autres pays européens comme la Suède et qui vise à pousser les chefs d'État à s'exprimer devant leur opinion publique sur ce sujet controversé mais souvent méconnu du grand public. Le patronat français est à la manœuvre.Il faut se souvenir qu’en janvier dernier, la mobilisation des journalistes du collectif Informer n’est pas un délit avait, avec d’autres organisations mis en échec un mandement de la Loi Macron finalement retiré le 30 du mois. Depuis une pétition portée par Elise Lucet a rassemblé 486.000 signatures. Mais ce qui a a été sorti par la porte tente de revenir par la fenêtre.Proposé par la commission européenne, ce projet de directive est actuellement en discussion dans le cadre du "trilogue" entre le Conseil, le Parlement et la Commission avec une troisième séance de négociation prévue jeudi 3 décembre. Il doit être théoriquement soumis aux votes des députés européens avant la fin de l'année.Le texte qui vise à instaurer un socle juridique européen pour lutter notamment contre l'espionnage industriel et protéger l'innovation a provoqué une levée de bouclier de très nombreuses organisations syndicales et ONG européennes qui dénoncent ses atteintes aux libertés fondamentales. Un appel européen intitulé "Stop Trade Secrets" a déjà été signé par 67 organisations issues de 11 pays européens.."Ce projet menace les droits fondamentaux et fait primer le droit des multinationales sur les intérêts sociaux, environnementaux et démocratiques", dénoncent les signataires de la lettre ouverte à François Hollande.Ils pointent "le flou" de la notion de secret des affaires et dénoncent le cadre retenu pour les infractions à ce secret qui auraient lieu "dès que ces informations seraient obtenues, quelle que soit la diffusion qui en serait faite et quel que soit l'objectif de cette diffusion".La lettre souligne aussi les conséquences pratiques du texte pour l'information du public sur des sujets d'intérêt généraux."Choix stratégiques, projets de cession ou de reprise, délocalisation… nombreux sont les élus et syndicalistes courageux qui communiquent aux salariés, voire à la presse, pour contrer les pratiques abusives des actionnaires. Avec cette directive, lanceurs d'alerte, syndicalistes, journalistes travaillant pour l'intérêt général risquent désormais d'être poursuivis en justice" écrivent les organisations.Scandales du Médiator, de l'amiante, évasions fiscales… "les +données à caractère commercial+ qui seraient protégées par le secret des affaires et dont la divulgation serait passible de sanctions pénales, relèvent souvent de l'intérêt général supérieur du public", soulignent-ils également.Les syndicats et ONG soulignent enfin la menace d'"une restriction de l'accès aux dossiers ou aux audiences" civiles ou pénales pour protéger le secret des affaires".
via www.humanite.fr